Jeanpop2 et le salut psycho-batave
Ce troisième et dernier volet de la table ronde consacrée aux oeuvres saintes de Jean Pop 2 promet d'en livrer la clef puisqu'il portera essentiellement sur le noyau dur de cette doctrine, à savoir le salut par la musique. Au vu des implications sérieuses de la question, le plateau se devait d'être plus relevé en matière de poètes et d'analystes. Aussi, les présences désormais coupables de L. et de C. étant proscrites, François Becquerel réfugié dans un ashram de San Bernardino, seuls M. Poire et le discret mais fulgurant Sred Sweign (Landive assumera le rôle de liant et de relanceur, ce qui est conforme à ses réelles dispositions) alimenteront la controverse.
Sred Sweign : contre l'idée d'une famille génétique, la famille d'élection musicale, c'est, je pense, là le salut, pour peu qu'il y soit.
Jean-Pierre Paul-Poire : plutôt que famille, j'avancerais le concept d'armée, mais pas du tout tel que le sens commun l'appréhende. Quand Jean Pop 2 évoque ses soldats Kenny And The Kasuals, il n'entend pas renverser un régime politique ou contester l'ordre social, pas plus qu'il ne souhaite éradiquer les guerres. Il est bien question de conquête, voire de croisade et ce, dans les termes spirituels les plus purs, ou bien défrichage et préservation d'un imaginaire accru, expansif, dédié à la beauté. Les foules rejettent cet idéal, simplement parce qu'elles n'en sont pas dignes.
Landive : ne soyez pas élitiste, Poire.
S.S. : j'aime, Poire, lorsque vous mettez en péril les conceptions d'autrui. Permettez-moi seulement de mieux défendre ma thèse, d'après laquelle la sanctification musicale s'accorde avec le thème de la famille d'élection. Ainsi, nos fils et les fils de Jean Pop 2 sont les groupes qu'il met en lumière, sont à une cause mondiale qui les dépasse, des sacrifiés iridescents. Voyez The Underdogs, que la perte de leur contrat précipita dans les crevasses de l'Histoire là où se forgent les armures immarcescibles de Jean Pop 2.
P. : Vous qualifiez là ce que certain philosophe nomme la Ruse de la Raison. J'ajouterai que si les lieutenants sont les fils, l'affection qu'on leur doit repose non pas sur de très hypothétiques liens héréditaires, même choisis, mais sur la bravoure de leurs actes, dans la mesure où ceux-ci ont atteint la majesté psycho-batave. Nous effleurons depuis le début cette notion centrale qui explique et motive le sacrifice et en somme offre le salut. J'aimerais, M. Sweign, que nous dirigions notre réflexion dans ce sens.
S. S. : La famille-armée de confession psycho-batave, nous tenons enfin le nom générique pour désigner ceux qui seront sauvés. Alors Sonny Flaherty, Wayne Proctor, James Knight, parce qu'ils sont turgides d'une même sève symbolique, ont pourchassé en régiments épars et aveugles les grâces souveraines du psycho-batave.
L. : (...)
P. : nous posons la question. Que faut-il pour jouer psycho-batave, si c'est là la condition pour entrer dans les rangs d'une famille-armée et ainsi obtenir le salut ? Je propose un premier élément de réponse qui serait le tamburine-beat insatiable, forme achevée de la pulsation du désir.
S.S. : du désir délivré d'assouvissement.
P. : un deuxième élément consisterait en la joie harmonique mesurée, telle que l'a portée à sa perfection The Easybeats, initiée par Roy Orbison, qu'on pourrait par ailleurs rapprocher, sans les confondre, de la délivrance harmonique replète de The Beach Boys, formation italo-américaine, et non psycho-batave. J'avance enfin un troisième élément qui est l'indépassable concision, où frémit le sentiment en même temps que la ferveur mélodique s'y fait jour.
S.S. : ce sont là pierres de touche d'un bâtiment merveilleux que l'esprit ne saurait embrasser dans son entier mais que vous et moi, Poire, pouvons décrire intuitivement, au moins en partie. Le psycho-batave comporte de si nombreux aspects que nous en donnons seulement les plus saillants. A nous d'en identifier le plus possible, afin de dresser un jour les Tables faramineuses du Psycho-batave.
L. : vous avez parlé de Pierre de Touche, ça m'a tout l'air d'être un sacré pédé progressif, celui-là.